La baie des pirates de Kekova - Turquie

Aujourd’hui, nous partons à la découverte de la baie de Kekova, une baie d’anciens grecs devenus lyciens, de pirates, et de tortues.

drapeau turc

Préparatifs

Pour faire toutes les recommandations du Routard présentées dans l’article précédent, le mieux c’est d’avoir une voiture. Mais je ne veux pas la louer tout seul. Donc j’essaie de créer un groupe Whatsapp pour que les gens puissent discuter et qu’on s’organise en fonction des propositions et envies de chacun. Je mets pas mal d’efforts mais au final ça fait un peu flop et le groupe ne sert qu’à partager les photos du coucher de soleil. Les gens ont déjà leur groupe, beaucoup sont sur le départ et j’ai peut-être été un peu en marge en étant le seul français au milieu d’australiens. Bref, mes plans sont difficiles à organiser.

Heureusement, un peu par hasard alors que je glandais dans mon lit, le seul espace frais de l’auberge, je rencontre Sora, la dernière coloc du dortoir. Sora est japonaise, mais sa mère est taïwanaise !!! Pour ceux qui ne le savent pas, j’ai fait un an d’échange à Taïwan, dont je me souviens comme un condensé de bonheur. Donc je lui parle un peu de mon expérience. Elle m’explique qu’elle se cherche un peu, elle avait commencé des études en psycho, mais la pandémie l’a cloîtrée dans son appartement de Kyoto et lui a donné surtout une bonne dépression.

Au final, je lui demande si ça l’intéresse d’aller à Kekova. C’est un must à faire dans le coin. J’ai prévu d’y aller en scooter mais il faut encore que j’en loue un. Elle me dit que ça l’intéresse, top, j’ai une collègue !

Je tombe sur Gabe et Jad qui font un tour en ville justement avec la voiture qu’ils ont loué ensemble, je saute dedans. Je trouve un endroit où je peux louer mon scooter 200₺/j soit 7€. (₺ c’est le symbole de la livre turque qu’on appelle lira là-bas).

chien et Gabe Gabe et son amour des chiens

Je rejoins ensuite Gabe et Jad au bar. Ces deux là sont copains comme cochons. Gabe est le bon copain de droite, celui qui aime être politiquement incorrect mais reste très humain. Il s’est fait tatoué dans le cou le nom de sa nièce qui vient de naître entouré du croissant turc.

Au bar, ils jouent une version du classique turc Şinanay qui pourrait mal se traduire par instant de bonheur pur

On part ensuite en boîte, on est rejoint par des gens de l’auberge. Pour rappel, je pars normalement le lendemain à Kekova. Je reçois enfin un message de Sora (j’avais un doute si elle souhaitait vraiment partir en expédition). Elle n’avait pas eu de nouvelles. Donc je la rassure, je suis juste en boîte. Gabe est un peu bourré et me raconte une de ses expériences parisiennes rocambolesques à ses 20 ans impliquant une femme de 40 ans, un chauffeur de taxi, du sexe et de la drogue. Je sais pas si l’histoire est vraie mais l’histoire est marrante.

petit chat Regardez le petit chaton trop trognon !!!

Finalement, ils décident de changer de boîte, ça tombe bien pour moi, je vais pouvoir rentrer. Gabe qui a repéré une magnifique russe va lui proposer de la rejoindre dans son hôtel 4* en Cappadoce. Elle accepte le numéro de Gabe par politesse. Je dis au revoir à un petit nombre de personnes qui se dispersent en Turquie.

Je rentre à l’auberge avec le scooter et je vais me coucher directement.

Kekova

Le lendemain, réveil à 8h, petit dej à l’ouverture à 8h30 et on est sur le départ à 9h et quelques. Il y a bien 40 minutes de route pour rejoindre le petit port qui nous emmènera faire l’excursion dans la baie. Sauf que le scooter que j’ai loué n’a pas la même puissance que celui de Rhodes. Il va tousser pour nous convoyer tous les deux à bon port. On passe chercher un casque à Sora et on est parti. Vitesse de pointe en montée : 30 km/h. C’est presque plus effrayant de voir les voitures nous dépasser à toute berzingue. J’ai à peine le temps de les voir dans mon rétro défectueux. Je roule dans la bande d’arrêt d’urgence pour plus de sûreté.

Le voyage n’est pas de tout confort, on arrive enfin à Kaleüçağız, et on trouve très rapidement un bateau qui veut bien nous prendre. C’est 500₺ la journée complète, repas compris. Donc vraiment abordable. On monte, on largue les amarres. Ouf ! Le voyage en scooter ne s’est pas transformé en fiasco total, tous les éléments étaient réunis pour.

La baie de Kekova regorge de trésors, au sens littéral. Pour commencer le bateau nous emmène voir les vestiges de la ville partiellement submergée d’Appollonia le long de l’île de Kekova. Appollonia était un port marchand lycien faisant commerce d’huile et de poissons. C’est également un lieu de refuge pour les bateaux et les populations. La ville a été engloutie par les eaux au IIème siècle à la suite d’un tremblement de terre qui a affaissé le niveau du sol de 3 à 4 m. Il est interdit de visiter l’île, ainsi que de pratiquer n’importe quel type de plongée car le site n’a pas encore été fouillé. Depuis le bateau, on peut apercevoir des églises, un chantier naval, des maisons. On laisse notre imagination déborder.

ruine dalle On voit la dalle du bâtiment anciennement présent, peut-être que des lunettes polarisées auraient permis de mieux voir sous l’eau

Un membre de l’équipage donne les indications en turc et vient nous donner les infos en anglais dès qu’il le peut. Mais je rencontre un drôle de trio composé de deux espagnoles la soixantaine accompagnées de leur guide turc. C’est Maria qui m’adresse la parole en français reconnaissant mon accent. Et Otgur le guide turc poursuit également en français ! C’est lui qui me donnera tous les détails sur la cité d’Appollonia à titre grâcieux. Lucia elle ne parle pas français.

ruine charpente Ici si vous regardez bien vous verrez les restes des façades avec des trous faits pour les charpentes

Le bateau fait différents arrêts hors de portée des ruines où l’on peut se baigner, j’ai récupéré un masque qui était dispo sur le bateau et je peux voir le fond et les poissons. Mais bizarrement c’est encore une fois très pauvre en faune et flore sous-marine alors qu’on imagine que ça grouille. Otgur explique qu’apparemment des tortues venaient encore pondre leur œufs ici il y a quelques années mais que ce n’est plus le cas aujourd’hui. Est-ce du au cycle bruyant et incessant des bateaux de touristes, à la pollution engendrée depuis la côte, au réchauffement des eaux ou à un cocktail de tout cela ?

baignade Quand on dit eau turquoise, c’est bien turquoise que l’eau est

Maria et Otgur deviennent également mes compagnons de voyage, Sora étant fatiguée et indisposée. Maria et Lucia font un tour complet de la Turquie avec Otgur qui a déjà tout planifié, hôtels, restaurants, activités. Ça coûte évidemment un peu plus cher d’avoir recours aux services d’Otgur mais franchement quel soulagement de n’avoir à rien planifier !
Maria est assez contente de se baigner avec moi car Lucia comme Sora ne sautent pas à l’eau. C’est peut-être une impression mais Maria flirte un peu avec moi, c’est pas désagréable. Elle me dit aussi que Agia Sophia a été transformée en mosquée de nouveau et que les mosaïques byzantines ont été recouvertes d’un drap. Je n’ose pas trop la croire. C’est pourtant vrai comme je le vérifierai plus tard.

Gros exploit

Pour le repas du midi, un petit barbecue est mis en place pour faire des grillades de viande et nous avons le droit à un énorme buffet. Je suis franchement rassasié. Un repas comme celui-là m’aurait coûté au moins 300₺.

Petit incident, je pose mon assiette sur la banquette et je demande à Sora de me prendre en photo je crois, sauf que ma fourchette glisse de l’assiette et tombe dans l’eau. Je prends quelques secondes avant de réaliser qu’elle ne coule pas immédiatement mais qu’elle tournoie horizontalement. Je me précipite alors et je plonge dans l’eau, prêt à remonter à la surface en héros ma fourchette à la main. Bon en fait, je la perds de vue, et je remonte penaud. Les archéologues du futur auront bien de la peine à écarter tous les restes du tourisme sur place. À la fin du repas, on nous sert du thé et des pastèques. C’est royal.

Kalekoy Kaleköy, le chateau byzantin

La dernière étape du voyage de la journée consiste à visiter le village de Kaleköy, son château byzantin et surtout son tombeau en partie immergé tout droit sorti d’un rêve. Sora et moi n’étions pas au courant de ce dernier, nous montons directement au château qui permet d’avoir un magnifique panorama sur toute la baie et surtout de s’apercevoir que le tombeau lycien immergé est juste en bas ! On redescend fissa aller voir ça.

panorama Panorama sur la baie de Kekova, si vous regardez bien en bas, vous verrez le tombeau lycien semi-immergé

tombeau immergé selfie et tombe Je me suis inspiré d’Indiana Jones ou Indiana Jones s’est inspiré de moi ?

Sora commence enfin à profiter un peu de l’excursion en mettant les pied dans l’eau à la poupe du bateau. Je l’accompagne.

Nous revenons finalement à Kaleüçağız. Nous disons un au revoir chaleureux à Otgur, Maria et Lucia et nous remettons pieds sur la terre ferme. J’arrive à convaincre Sora d’aller voir la nécropole lycienne située juste à côté. La nécropole est un ensemble de tombes lyciennes massives joliment décorées et présentant des inscriptions en lycien (une sorte de grec adapté). Tout l’endroit est mystérieux, et j’ai très peu d’informations sur les lyciens (le Routard est laconique sur le sujet).

necropole Nécropole au bord de l’eau

On prend quelques photos marrantes et puis on va se prendre une glace assis devant les bateaux. Je pose des questions sur la vie de Sora, elle vide son sac sur la vie au Japon, les japonais, les études, le covid, la famille. Elle a un copain japonais aux Etas-Unis mais n’a aucune envie de le rejoindre dans le bled paumé où il séjourne pour l’instant. Ils doivent voyager ensemble pendant un an. Heureusement ses parents sont suffisamment aisés pour lui permettre d’échapper à un environnement franchement étouffant.

Tombe lycienne Sora me fait la traduction

On reprend le scooter pour rentrer à Kaş. Le bolide n’apprécie pas la chaleur, le voyant moteur se met à clignoter en jaune. Je m’arrête pour appeler l’agence parce que je n’ai pas envie que le scooter nous explose à la figure. Ils me répondent “T’inquiète c’est normal”. Pas super rassurant mais on est reparti.

Alors que j’allais prendre un virage serré, j’aperçois un truc bizarre sur la route. Je ralentis, c’est une tortue !!! Elle traverse la route tranquillement au milieu d’un paysage aride. Comment elle est arrivée là ??? Sora devient complètement fada, elle adore les tortues. On la déplace sur le bord de la route pour ne pas qu’elle se fasse écraser et on repart. Sora m’explique qu’elle ressemble exactement à sa tortue au Japon.

tortue La grosse tortue !!!

On n’est pas au bout de l’aventure, à portée de Kaş, on s’arrête à un point de vue avec un super panorama sur toute la baie de Kaş cette fois-ci et sur la presqu’île.

panorama kas Baie de Kas cette fois-ci

Puis on redescend, le soleil est sur le point de se coucher, on s’arrête pour l’admirer et puis on rentre enfin à l’auberge.